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dimanche, 22 janvier 2023

Guillaume Basquin chronique "Mausolée de intellectuels" de MBK

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Mehdi Belhaj Kacem

Mausolée des intellectuels

Fiat Lux

191 pages, 20 €

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DE LA DÉSORIENTATION DES INTELLECTUELS

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Guillaume Basquin

 

Après Colaricocovirus, d’un génocide non conventionnel, le philosophe et écrivain Mehdi Belhaj Kacem réitère ses frappes contre la Coronafolie, les concentrant ici sur les Grosses Têtes Molles de notre époque : les « philosophes » de la « gauche » radicale chic : Alain Badiou, Bernard-Henri Lévy, Michel Onfray, Jacques Rancière, Jean-Claude Milner, Slavoj Žižek, etc. (Je m’abstiens de citer les autres noms, tant ils sont insignifiants…)

Ce livre constitue la version longue d’une lettre ouverte à Alain Badiou, parue initialement en mars 2022 dans le journal France-Soir, « Remarques sur la désorientation d’Alain Badiou (et des intellectuels en général) ». Pourquoi Badiou ? Eh bien parce que Belhaj Kacem fut son élève, qu’ils eurent une longue relation intellectuelle, et qu’il est le seul qu’il respecte et lit encore parmi tous les cités supra. De plus, il est le parangon de la radicalité chic de « gauche », publie chez un « grand » éditeur (le Seuil), et vend pas mal de livres ; ce qui en fait une Grosse Tête Molle de choix.

Pour composer cet assassinat parfait du monde « intellectuel » français, Belhaj Kacem fait comme il se doit désormais appel à la figure tutélaire de Guy Debord, qu’il qualifie à bon droit de meilleur et plus important penseur français de la seconde moitié du XXe siècle.

« La “société du spectacle”, disait Debord, est le stade où l’accumulation du Capital atteint un tel degré qu’elle devient image. » Comment continuer à ne pas voir que nous avons vécu, depuis 3 ans, le spectacle d’une pandémie, et pas une pandémie réelle, au sens ancien du mot (des morts partout, dans les rues, dans chaque famille) ? « Le bon peuple n’a plus affaire à des expériences réelles, par exemple une pandémie de peste noire, qui tue à nos portes un tiers de la population, mais à la représentation [télévisée] d’une pandémie. » Qui pourrait nier cette affirmation apparemment provocatrice de notre philosophe ? Jetez-lui la première pierre, vous qui doutez encore de la plaie du Christ !

Voici le tour de passe-passe sémantique qui a permis de faire passer la pilule : l’OMS déclare une pandémie (en en ayant changé auparavant les critères de létalité etc.), donc il y a une pandémie ! On sa rappelle du syllogisme suivant : « Tous les chats sont mortels. Socrate est mortel. Donc Socrate est un chat. » Seul un contrôle strict de l’information, désormais concentrée en très peu de mains (de milliardaires patentés), aura permis de faire passer pour complotistes ceux qui ont douté que Socrate fût un chat. Belhaj Kacem de conclure à ce sujet : « On ne méditera jamais assez l’observation de Debord à ce sujet : “Jamais censure n’a été plus parfaite. Jamais l’opinion de ceux à qui l’on fait croire encore, dans quelques pays, qu’ils sont restés des citoyens libres, n’a été moins autorisée à sa faire connaître, chaque fois qu’il s’agit d’un choix qui affectera leur vie réelle”. »

Que l’on pense ici au traitement médiatique qui a été infligé à deux des meilleurs infectiologues français, Didier Raoult et Christian Perronne… Pire : « Jamais il n’a été permis de leur mentir avec une si parfaite absence de conséquence [voir la clause de non-responsabilité des laboratoires pharmaceutiques dans la “vaccination” Covid-19]. Le spectateur est censé ignorer tout, ne mériter rien. » Concentration du Capital, concentration de l’Information, et concentration du contrôle de la « Santé », c’est la même chose, martèle (et on le suit sur ce point) notre philosophe : ce « ne sont pas des questions séparées ». Il faudra s’y faire : la crise Covid-19 fut une pandémie performative.

Pour l’assassinat en règle (et bien mérité) d’Alain Badiou, Belhaj Kacem se sert du classique des classiques de la philosophie, le Mythe de la caverne : « Des êtres humains sont enchaînés au fin fond d’une caverne. Ils représentent, métaphoriquement, l’ignorance où est plongé le commun des mortels. Ils n’ont jamais vu le soleil, dont ils ne reçoivent que des rayons très affaiblis. Un feu dans leur dos projette sur les parois de la caverne des ombres, tant d’eux-mêmes que des objets environnants, qu’ils prennent pour la réalité elle-même ; ils dodelinent du bonnet comme des débiles, en suivant les mouvements de ces ombres. Ils représentent donc, selon Platon, l’état d’hébétude cognitive où est plongée l’écrasante majorité de l’humanité. » Quel est donc le rôle du philosophe dans ces conditions ? Eh bien « de défaire ces prisonniers de leurs chaînes, et de les guider vers le soleil de la Connaissance vraie, métaphorisée par le Soleil ; et qui est, dans la réalité, les Idées intelligentes de la Philosophie, armée notamment des Mathématiques. » Tout le livre, ce Mausolée des intellectuels, consistera en la tentative de faire sortir Badiou de sa Caverne cathodique. Tâche difficile, il semblerait… Les invectives fusent… « Il est grand temps que vous [Badiou] sortiez de votre petite “caverne portative”. » « Voir de “l’individualisme bourgeois“ ou du “culte du moi” » chez les rétifs à la « vaccination », « c’est vraiment avoir une hallucination, justement celle du bon bourgeois enfermé chez lui à regarder sa télé, sans penser une seconde à autrui. Là encore, on a manifestement plus affaire à un “caverneux” moderne, l’œil rivé à sa petite lucarne, qu’à un philosophe digne de ce nom. » Au suivant ! Enthoven ? BHL ? Žižek ? Ne me faites pas rire… L’occasion pour Belhaj Kacem de développer une idée forte : « La philosophie, par elle-même, ne crée aucune vérité [au mieux, elle invente des concepts, idée que je développerai dans un futur texte consacré au grand œuvre de Mehdi, Système du pléonectique]. Elle accueille les vérités de son temps, venues de la science, de la politique, de l’amour et des arts. »

Maintenant que l’assassinat du lâche Badiou est acquis (« “La caque sent toujours le hareng”, écrivait Debord au sujet des staliniens, et le bourgeois diplômé finit toujours par rentrer dans la niche de son extraction cossue »), forons un peu plus loin dans le livre. Belhaj Kacem s’aligne sur les idées nouvelles du plus grand philosophe européen encore en activité, à savoir Giorgio Agamben : « Le “communisme” est parfaitement compatible avec la privatisation la plus extrême des biens publics, et la concentration du Capital la plus intense qui fût jamais de toute notre Histoire ! » Agamben lui-même, dans un texte prophétique (un de plus…), Capitalisme communiste, nous montra que cette crise de civilisation que fut le Covid-19 concentra le pire du capitalisme (concentration sans précédent des capitaux et de l’information) dans le pire du communisme (suppression de l’individu et, partant, de tout libre-arbitre). Belhaj Kacem de nous prévenir : « Ils [la clique de Davos] nous préparent simplement, à la chinoise, une fusion de ce qu’il y a de pire dans le capitalisme, et de ce qu’il y a de pire dans le communisme d’État. […] Ainsi, quand la santé sera entièrement privatisée, nous serons privés de toute santé. » Comment ? Vous rêvez encore, avec les bobos de la première heure, d’un (fameux… fumeux !…) monde « d’après » résilient et tout et tout ? Rêveur (niais) définitif… Agamben : 1 / Badiou : 0.

« Quand tout sera privé, nous serons privés de tout » : réfléchissez bien à cette phrase, mon lecteur…

À peine avons-nous chassé Badiou par la porte principale, qu’il revient par la fenêtre, dans une invitation faite au « Grandphilosophe » d’écrire une lettre au gourou de Davos, j’ai nommé Klaus Schwab (fils de dignitaire nazi, doit-on le rappeler ici ?), pour « défendre le projet explicite de Davos pour la quasi-totalité de l’humanité : l’abolition non seulement de la propriété privée [et non pas de la société marchande], mais même de la très “bourgeoise” notion de “vie privée” ». Les Khmers rouges (si chers à notre penseur « radical »), redux !… Belhaj Kacem a bien raison, et même si cela choquera quelques chastes oreilles, de considérer que le régime macroniste covidiste est le pire qui fût jamais de notre Histoire ; et « l’Histoire retiendra que le très scientiste M. Badiou aura fini dans la peau tragi-ridicule d’un Monsieur Homais, au service du Dr Mengele » (en en appelant à la « vaccination » obligatoire de tous)… Aïe ! Mais comment le Badiou a-t-il pu ne pas voir que toute biopolitique se termine forcément en thanatopolitique ? C’est un mystère… Définitivement, Badiou, comme tous les universitaires ou presque, est un planqué : un Assis (au sens rimbaldien) ! « Chaque fois qu’il fallait payer d’exemple concret », le spécialiste de « l’immortalité » et de « l’infini » se sera défilé, et CONfiné.

« Toute la vie des sociétés dans lesquelles règnent les conditions modernes de production s’annonce comme une immense accumulation de spectacles. Tout ce qui était directement vécu s’est éloigné dans une représentation. » S’appuyant sur la thèse n°1 de La Société du spectacle (de Guy Debord), Belhaj Kacem s’interroge si Badiou a déjà seulement essayé de parler à des Gilets jaunes en manifestation, ou à des manifestants anti-pass ? Comment ? S’approcher de ce peuple d’esstrêmedroate qui sent l’ail et la vinasse ? Pas question ! « La sortie de la Caverne n’est pas un dîner de gala » !… et Badiou n’a définitivement rien compris à Debord : l’envers de la science n’est pas la science, ni l’envers de la médecine n’est la médecine, ni non plus l’envers de la santé publique (qui, doit-on le rappeler, devrait être, selon la définition même de l’OMS, un état de complet bien-être physique et mental) n’est la santé publique. Badiou a-t-il lu Feuerbach (« notre temps préfère l’image à la chose, la copie à l’original, la représentation à la réalité » ? Hum… Badiou, c’est le professeur de philosophie moribond dans le boudoir de l’université… La vie philosophique devrait être la mise en pratique dans sa vie réelle des principes philosophiques écrits sur le papier, et non pas l’envers de ceux-ci ; en ce sens, Badiou n’est aucunement un philosophe ! ce n’est qu’un universitaire abstrait… Après le crime parfait que constitue ce livre, Badiou quittera-t-il sa niche d’Ivoire universitaire ? (La voie droite était perdue, et la forêt macronienne fort obscure…) C’est toute la question…

N’empêche, et puisque selon l’adage, « qui ne dit mot consent », quels sont les intellectuels français qui peuvent – ou pourront – se targuer de vivre philosophiquement hors de ce terrible mausolée construit par Mehdi Belhaj Kacem ? Qu’ils sortent du bois obscur !… Car « pour la postérité, ça ne pardonnera pas, et même dans l’avenir le plus immédiat » : « “Vive le pass !”, entérine l’insurrectionnel Badiou [fan absolu de Mao, ne l’oublions pas], c’est-à-dire “vive la mesure de contrôle et de surveillance la plus contraignante qui ait jamais été inventée pour verrouiller la population”. » Et Mehdi de (provisoirement) conclure, en forme de point d’ironie exclamatoire : « Heil Pfizer ! »

 

(Ce texte est d'abord paru dans la revue TK-21. Nous remercions son auteur de nous avoir autorisé à le reproduire.)